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Plan d'urbanisme 2050 de Montréal: implications pour les acheteurs et vendeurs de terrains

Rédigé par Alexandre L. Watson | 12.7.2024

Le Plan d'urbanisme de Montréal (PUM) a été dévoilé le 11 juin dernier. Alors que l'Office de consultation publique de Montréal (OCPM) lance sa grande consultation publique en vue d’une adoption en 2025, nous avons jugé opportun de partager notre compréhension de ce que cette nouvelle vision apporte au développement foncier à Montréal.

En somme, ce nouveau PU est bien plus sophistiqué et détaillé que l'actuel. De nombreuses nouveautés et des analyses préalables approfondies montrent la volonté de l'administration Plante de promouvoir un développement urbain équitable et optimal pour l'habitabilité de Montréal. Bien que cette orientation soit louable, la complexité est très élevée et les solutions de gouvernance effective manquent. Nous nous interrogeons sur l'impact de ce nouvel outil sur le développement immobilier à Montréal.

Comprendre le Plan d'Urbanisme (PU)

Un plan d'urbanisme (PU) est une vision officielle du développement urbain d’une municipalité. Il sert de référence pour toutes les modifications des règlements d’urbanisme dans la même juridiction.

Il est important de préciser qu’un PU, seul, n’accorde aucun droit foncier comme le fait le zonage.

 

La gestion entre la région, la municipalité et l’arrondissement

Comme ailleurs, la gestion du territoire est hiérarchisée au Québec.

Dans la région de Montréal, la CMM propose depuis 2011 une vision régionale avec le Plan métropolitain d'aménagement et de développement (PMAD), actuellement en cours de refonte et bientôt dévoilé. Le PMAD, équivalent du Schéma d’aménagement d’une MRC, constitue le palier régional de gestion du territoire.

Ensuite viennent les plans d’urbanisme des municipalités (PU), qui doivent aligner leurs orientations sur le Schéma d’aménagement.

Puis, les réglementations municipales en urbanisme (règlements de zonage, lotissement, de démolition, sur les PIIA, sur les PAE, etc.) doivent correspondre aux PU.

 

Le plan d’urbanisme a-t-il un effet sur la valeur de mon terrain?

C’est une question importante.

Si l’usage le meilleur et le plus profitable (l’UMPP) du terrain correspond au zonage déjà en place, la réponse est non.

Si l’UMPP nécessite un changement de zonage, alors tout dépend de la perception du risque de zonage de l’acheteur. 

Deux facteurs clés influencent cette perception : 

  1. le degré de concordance entre la réglementation en urbanisme et le PU
  2. la réputation de l’arrondissement auprès de la communauté des promoteurs

La concordance est un enjeu majeur dans la gouvernance du développement urbain au Québec. Il y a trois degrés typiques :

  1. Certaines municipalités ou arrondissements adoptent des règlements de concordance qui harmonisent la réglementation avec le PU.
  2. D'autres prévoient des règlements de concordance qui exigent l'examen des demandes de changement de zonage au cas par cas, à condition qu'elles soient conformes au PU.
  3. En revanche, plusieurs ne prennent aucune de ces mesures et conservent le pouvoir discrétionnaire d'étudier les demandes de changement de zonage individuellement, sans obligation préalable.

Actuellement, à Montréal, la situation varie d’un arrondissement à l’autre. Les arrondissements périphériques tendent à ne pas se lier d’obligations en recevant des demandes de changement de zonage qui correspondent au PU. Tout cela semble appelé à changer avec le PUM.

Le PUM ne sera pleinement effectif qu'une fois que chaque arrondissement aura adopté un règlement de concordance, alignant ainsi leurs propres règlements avec le plan de la ville. Jusqu'à ce moment, les projets conformes au PU actuel peuvent toujours progresser.

 

Est-ce que le PUM a déjà un impact sur le marché du terrain ? Puis-je déjà travailler un changement de zonage basé sur le PUM ?

C’est la question que Landerz cherche le plus à décoder.

Bien que le PUM ne soit pas en vigueur, il semble que certains arrondissements s’appuient déjà dessus pour des dossiers majeurs.

Il est assez clair qu’au moment du dévoilement du PUM, Montréal est entrée dans une période de confusion pour les promoteurs, pouvant durer jusqu’à 30 mois selon l’arrondissement.

La durée de cette période variera selon les arrondissements. Tandis que la région et la ville-centre définissent une vision globale, la réglementation des arrondissements dicte tout ce qui encadre le développement immobilier.

  1. La ville-centre a consulté les arrondissements en 2024 et aurait exprimé son intention d’exiger l’adoption de réglementations alignées à l'échelle de leurs territoires respectifs dans un délai initial de 6 mois, avec la possibilité d'extensions jusqu'à 18 mois;
  2. Les arrondissements auraient deux possibilités pour donner suite: 1) un PUM local et un règlement de concordance, 2) un règlement d’urbanisme refondu, en parfaite correspondance avec le PUM;

Il est trop tôt pour savoir comment ce changement sera vécu concrètement. Nous savons que certains arrondissements, en particulier ceux qui sont les plus alignés avec l'administration Plante, commencent déjà à intégrer le PUM dans leurs discussions internes et leurs prises de position sur des projets d'envergure à long terme. La situation se précisera au cours de l’année.

 

Le PUM est-il une bonne ou une mauvaise nouvelle pour le potentiel de développement de mon terrain ? Où sont les opportunités ?

Le PUM est autrement plus sophistiqué que le PU en vigueur depuis 2004. Plusieurs concepts sont nouveaux, certains ont été retirés ou réenvisagés.

Ayant parcouru le PUM, nous relevons quatre indicateurs clés de son impact sur les terrains:

1. Secteurs d’opportunité

Les concepteurs du PUM ont fait un travail exceptionnel de repérage de secteurs présentant un potentiel de transformation urbaine. Ces secteurs sont nommés “Secteurs d’opportunité”. Il s’agit sans doute du plus important indicateur de changement positif pour un terrain, son potentiel de développement et sa valorisation potentielle.

2. Degrés d’intensification

La notion d’intensification est une nouveauté importante. Nous aurons dorénavant droit à des secteurs désignés pour de l'intensification urbaine. Ici, les concepteurs du PUM ont choisi une approche qualitative et prescriptive: on a désigné des secteurs à potentiel d'intensification, on a discerné leur potentiel (intensification élevée, intermédiaire et douce) et on encadre chaque degré d'intensification avec une série de prescriptions d'ordre qualitatives.

Toutes ces mesures découlent d'une analyse des caractéristiques des milieux urbains indicateurs de leur capacité à recevoir plus de densité (accès au transport collectif structurant, potentiel d'amélioration de la qualité de vie, optimisation des infrastructures en place, potentiel de qualité en architecture, échelle humaine, etc.). Nous continuerons à étudier la notion d'intensification pour mieux comprendre ce qui en ressort pour l'industrie du développement immobilier.

La nature qualitative de l'intensification nous amène à envisager les effets de cette notion sur la densification avec prudence.

3. Densités résidentielles

Un fait marquant est la disparition des notions de densité et de hauteurs du PU actuel.

Ces notions, actuellement analogues à la réglementation d’urbanisme (plafonds de C.O.S. et de hauteurs), seront remplacées par la densité exprimée en termes de minimums de logements par hectare, comme c’est le cas dans les schémas d’aménagement (le PMAD de la CMM).

Il n’y a plus de notion de densité pour les usages autres que résidentiels.

Nos premières impressions sont que les minimums proposés dans le PUM ne relèvent pas la barre en termes de densité, malheureusement.

 

4. Affectations

Des changements importants ont été apportés aux libellés, définitions et à la carte des affectations.

Par exemple, l'affectation "Secteur d'emplois" disparaît entièrement, l'affectation "Activités économiques" apparaît, plusieurs secteurs évoluent vers une affectation "Mixte", la plus flexible de toutes les affectations.

 

Qui sont les gagnants avec le PUM? Qui sont les perdants?

 

LES « GAGNANTS »

Prochaines générations de montréalais et montréalaises : Le PUM propose une ville plus cohérente et habitable, mieux alignée avec les enjeux du développement urbain. Si la lourde gouvernance du développement urbain à Montréal ne freine pas les investissements, le Montréal de 2050 sera une ville fort accueillante.

Urbanistes de projets : Le PUM est riche en pensée progressiste, en complexité et en paramètres qualitatifs. Les urbanistes travaillant pour les promoteurs y trouveront bien plus de matière que dans le PU actuel pour développer des argumentaires auprès des municipalités. Leurs services auront ainsi une plus grande valeur, car le déploiement des meilleures pratiques aura une incidence bénéfique sur les résultats pour leurs clients.

Promoteurs engagés : Les promoteurs engagés, ceux qui travaillent en déployant des valeurs communautaires et cherchent à contribuer au bien-être des parties prenantes locales, connaîtront davantage de succès. En cultivant la bonne volonté des arrondissements, ils pourront naviguer avantageusement les paramètres qualitatifs du PUM. Rappelons que le PU actuel limite sèchement les potentiels de avec des plafonds de densité et de hauteurs

Propriétaires fonciers avertis en immobilier (dans certains secteurs) : Le PUM identifie plusieurs nouvelles zones de développement potentiel à travers Montréal, créant des "hotspots". Si vous possédez un terrain dans l'une de ces zones et avez une connaissance de l'immobilier ou êtes supportés en valorisation foncière, vous gagnerez.

 

LES « PERDANTS »

Parties prenantes pro-densité : Les groupes, citoyens et élus qui préconisent un développement urbain à plus forte densité, par exemple à l’intérieur des Aires TOD, devront continuer à argumenter le mérite de la densité. Les seuils minimums de densité résidentielle du PUM sont assez bas, bien en deçà de ce qu’il est possible d’accomplir avec des aménagements de type smart density.

Propriétaires fonciers inexpérimentés : Le PUM n'annonce aucune refonte de la gouvernance du développement urbain ni d'amélioration de la prévisibilité des processus de modification réglementaire. Faute de prévisibilité, les promoteurs privés et leurs investisseurs continueront d'aborder les opportunités avec prudence, freinant ainsi l'activité de développement immobilier à Montréal et impactant négativement le marché du terrain de développement. Si vous vous trouvez dans cette situation, envisagez de contacter Landerz.

Urbanistes municipaux : Les urbanistes municipaux, tout comme les promoteurs, ont à cœur le développement urbain. Cependant, le PUM n’offre rien en termes de révision de la lourde et chaotique gouvernance du développement urbain à Montréal. Les directions en urbanisme des arrondissements continueront à être submergées par l’obligation de traiter chaque projet nécessitant une modification réglementaire (dérogations, PPCMOI, etc.) individuellement, et leurs chefs de division continueront à dépendre du courage des élus pour faire avancer les dossiers. Ce constat pourrait changer selon les règlements de concordance qui seront adoptés dans chaque arrondissement après l’adoption du PUM.

Contribuables Montréalais : La vision du PUM est ambitieuse sur le plan de la mobilité et de l’habitabilité de Montréal. Sans la densité nécessaire pour soutenir les investissements en infrastructure et consommer les services, qui paiera la facture ? Poser la question, c’est y répondre.

Montréal économique : La crise de l’habitation pourrait encore s'aggraver avant que la tendance ne s’inverse, freinée par une croissance de l’offre inférieure à la croissance démographique. Une crise de l’habitation freine l’économie en raison de la main-d'œuvre insuffisante, délocalisée et plus coûteuse. L’absence d’allègement de la gouvernance du développement urbain dans le PUM est une mauvaise nouvelle à cet égard.

 

Comment consulter le PUM pour en apprendre davantage ?

Ouf! Consulter et décoder le PUM dans son format PDF statique est un vrai défi. Montréal pourrait suivre l’exemple de Laval et créer une version dynamique où, en entrant un numéro de lot ou de zone, on obtient un sommaire complet des paramètres d’urbanisme.

Voici quatre endroits qu’il faut absolument fureter pour se donner une bonne idée vis à vis un terrain précis:

  1. Pour savoir si le PUM réserve de nouvelles opportunités pour mon terrain, il faut parcourir le Chapitre 4 - Les secteurs d’opportunité.

  2. Pour un aperçu des affectations du sol, niveaux d’intensification, densités résidentielles et patrimoine, il faut consulter l’Annexe 6 - Les agrandissements de cartes par arrondissement et tenter de repérer son terrain.

  3. Pour comprendre les motifs du PUM et les nouvelles notions qu’il contient, il faut lire le Chapitre 2 - La stratégie montréalaise

  4. Le Tableau 5.1 à la fin du Chapitre 5 - Les affectations du sol, détaille les usages permis sous chaque affectation du sol

 

Finalement, les opinions exprimées dans cet article reflètent le point de vue de Landerz, une firme spécialisée en données immobilières et transactions de terrains, et ne prétendent pas être une analyse d'expert en urbanisme. Notre intention est de partager des observations et des réflexions sur le nouveau Plan d'Urbanisme et de Mobilité de Montréal du point de vue de professionnels du développement immobilier. Pour des analyses techniques ou des conseils spécialisés, nous recommandons de consulter des urbanistes certifiés ou des experts en planification urbaine.

 

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